"La Route des nouilles"
Le premier héritage culinaire chinois est bien sûr la nouille, le grand classique des cuisines asiatique et italienne. Les Chinois ont presque autant de mots pour les nouilles que les Esquimos pour la neige. On nomme différemment les nouilles faites de farine de blé (miàn 面), d'amidon de fèves (fen) ou de farine de riz (xian)... et puis les nouilles peuvent être étirées (la), taillées (qie), pressées mécaniquement (jiya), pelées (xiao) ou pétries (rou). Un bol de nouilles froides épicées ne coûte que quelques yuans si vous l'achetez auprès d'un cuisinier à roulettes dans les rues de Beijing, mais vous le payerez quelques centaines de yuans dans l'un des meilleurs restaurants de la ville.
Nombreux sont ceux qui mettent en doute l'affirmation selon laquelle toutes les nouilles conduisent en Chine. Un mythe répandu voudrait que ce fût Marco Polo qui aurait introduit les nouilles et autres pâtes en Italie. Dans ses fameux récits de voyage il racontait que les Chinois "ne vivent principalement que de riz, de sorgho et de millet..., [le blé] n'étant consommé que sous la forme de vermicelles ou de pâtes". Cependant la thèse selon laquelle Marco Polo aurait rapporté les pâtes avec lui est disputée par les historiens. Les gourmets italiens insistent avec indignation que les pâtes ont été inventées séparément dans leur pays.
Que les nouilles européennes soient ou non venues de Chine, on n'a en revanche aucun doute sur le lieu de leur première invention. En 2002, des archéologues ont exhumé près de Lajia les nouilles les plus anciennes du monde : un faisceau de millet et de sorgho conservés près d'un bol en terre cuite. D'après la datation, ces nouilles étirées à la main, sont vieilles d'environ 4 000 ans. D'autre part, la première mention écrite parlant de nouilles date de la période des Hans de l'Est (25-220), et elles sont devenues une nourriture courante dès le IIe siècle de notre ère.
Jen Lin-Liu est une journaliste étrangère et critique gastronomique qui a habité pendant plus de 10 ans à Beijing. Son amour pour la nourriture chinoise remonte plus loin que pour la plupart des expats : après avoir appris la cuisine chinoise et travaillé pour divers vendeurs de nouilles, aussi bien dans la rue que dans des restaurants élégants, elle a fini par ouvrir son propre restaurant haut de gamme à Beijing.
Voyageant en Italie, Ms. Lin-Liu n'a pu que remarquer que certains savoirs-faire italiens ressemblaient à ceux qui ont cours en Chine. C'est ce qui l'a décidée à faire un voyage sur la Route de la Soie pour suivre le cheminement des pâtes de Beijing à Rome. Dans son récit de voyage, Sur la Route des nouilles, elle nous confie ses réflexions alors qu'elle suit l'histoire des spaghetti à travers l'Asie centrale et dans le Moyen-Orient...
(tiré de l'article "La cuisine chinoise s’exporte" sur La Chine au Présent)