La Légende du Yi Jing
Dans l’antiquité la plus immémoriale, le monde fut d’abord régenté par 3 "Augustes souverains". Le premier s’appelait Fu Xi. Aux humains créés par Nü Wa, sa contrepartie féminine, Fu Xi enseigna quatre choses, les quatre piliers sur lesquels repose toujours la culture chinoise : la cuisine, les rites, les nombres et un système de 8 figures linéaires qui seront par la suite appelés trigrammes.
Après le règne de Fu Xi, deux autres augustes souverains développèrent la civilisation chinoise : Shen Nong, le "Divin Laboureur" qui enseigna aux Chinois l’agriculture et Huang Di, "l’Empereur Jaune" qui leur apprit mille arts et techniques, dont l’acupuncture et la sériciculture.
Ensuite apparurent les dynasties humaines. La première, celle des Xia, fondée par Yu le Grand, se développa puis dégénéra. Vint alors la deuxième, celle des Shang, fondée par Tang le Victorieux, qui à son tour, après un temps de grandeur, entra en perdition. A cette époque, un peuple du Nord-Ouest, le clan des Ji, était en ascension. Son roi, Chang l’Etincelant, victime d’une calomnie, fut emprisonné sur l’ordre du dernier souverain des Shang. Durant sa détention, il imagina une autre disposition octogonale des 8 figures de Fu Xi.
Il eut aussi l’idée de les assembler deux par deux, créant ainsi 64 figures linéaires qui furent appelées hexagrammes. Il leur donna à chacune un nom et un court paragraphe d’explication : les Jugements.
Pour avoir ajouté des écrits à ce qui n’était jusqu’alors que des signes linéaires muets, Chang reçut comme nom de culte Roi Wen - Wén Wáng 文王 (文wén : écriture). A sa mort, son fils ainé partit en guerre contre les Chang, les vainquit, renversa la dynastie et installa à leur place son clan qui prit alors comme nom dynastique Zhou, c’est-à-dire "les Universaux". il fut honoré pour ses exploits militaires sous le nom de Wu Wang (roi de la guerre).
A sa mort, vite survenue, la régence et l’éducation de son jeune fils furent confiés à son frère puiné que la postérité honora sous le nom de Zhou Gong, le sage duc des Zhou. Pour l’éducation de son neveu il rédigea des explications détaillées des 64 chapitres, qu’on appela "Texte des traits" et qui avec le "Texte du Jugement" forment le texte canonique de ce qui devait s’appeler jusqu’à aujourd’hui le ZHOU YI 周易 (livre des changements (易Yì) de la cour des Zhou).
Cinq siècles plus tard apparut un nouveau sage, Confucius, qui paracheva en la déployant l’œuvre inaugurée par Fu Xi, rédigée par le roi Wen et développée par le duc des Zhou en rédigeant l’intégralité des "Commentaires canoniques" connus plus tard sous le nom des "Dix Ailes".
Ainsi naquit le Classique (经jìng) des changements (易yì), "Yijing" que la dynastie des Han allait placer en tête des 5 "Classiques confucéens" et dont l’étude allait occuper les lettrés chinois 20 siècles durant.
Tiré de « Le discours de la Tortue » Cyrille J-D Javary - Ed. Albin Michel